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L’émergence de nouveaux procédés de contrôle des « petites » concentrations stratégiques

Activité de recherche
L’émergence de nouveaux procédés de contrôle des « petites » concentrations stratégiques
Photo de la salle de l'IRDA
Le deuxième rendez-vous de l’IRDA de l’année, animé par Emmanuelle CLAUDEL, s’est tenu le mercredi 1er février

Dans le cadre des Rendez-vous de l’IRDA, Emmanuelle CLAUDEL, Professeur à l’Université Paris Panthéon-Assas, est intervenue sur le thème de « l’émergence des nouveaux procédés de contrôle des « petites » concentrations stratégiques ».

Après avoir rappelé, chiffres à l’appui, le gigantisme des big tech et le rythme très soutenu de leurs acquisitions de start up innovantes, Emmanuelle CLAUDEL a présenté les difficultés juridiques auxquelles se heurte toute velléité de contrôle de ces opérations. Tout en soulignant que la majorité de ces acquisitions ne sont pas prédatrices mais davantage destinées à intégrer, de manière horizontale ou verticale, les innovations des start up, Emmanuelle CLAUDEL a expliqué que leur contrôle se heurte à deux principaux facteurs : d’une part, un déficit d’information de l’autorité de la concurrence et, d’autre part, le fait que les rachats des start up par les big tech se situent bien souvent en deçà des seuils de notification, de sorte que ces concentrations échappent au contrôle des autorités.

Ces difficultés juridiques établies, le professeur CLAUDEL a exposé les voies qui sont aujourd’hui explorées pour les surmonter.

La première est la technique du renvoi, sur le fondement de l’article 22 du règlement 139/2004, qui permet à l’autorité nationale de la concurrence de renvoyer à la Commission européenne des opérations présentant des seuils inférieurs aux seuils nationaux d’intervention de l’autorité. Si cette solution est aujourd’hui débattue en doctrine et par les acteurs économiques, elle n’en demeure pas moins acquise par la Commission qui en a posé les conditions dans des orientations récentes du 26 mars 2021, à savoir, notamment, l’existence d’une pratique affectant le commerce entre les États membres et menaçant d’affecter de manière significative la concurrence sur le territoire du ou des États membres qui formulent la demande.

La deuxième est la création de règles spécifiques pour certains opérateurs, en particulier les big tech, que le Digital Market Act du 14 septembre 2022 concrétise en instaurant désormais une obligation d’information au sein de son article 14 aux termes duquel le contrôleur d’accès (gatekeeper) doit désormais informer « la Commission de tout projet de concentration au sens de l’article 3 du règlement (CE) no 139/2004, lorsque les entités qui fusionnent ou la cible de la concentration fournissent des services de plateforme essentiels ou tout autre service dans le secteur numérique ou permettent la collecte de données, que ce projet soit soumis à une obligation de notification à la Commission en application dudit règlement ou à une autorité nationale de concurrence compétente selon les règles nationales en matière de concentrations ».

Enfin, une troisième voie est aujourd’hui explorée par les plaideurs, dont le succès dépendra de la réponse à une question préjudicielle posée par la Cour d’appel de Paris à la Cour de Justice de l’Union Européenne : il s’agit de la possibilité d’utiliser le droit des pratiques anti-concurrentielles au titre de l’article 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne comme moyen de contrôle de certaines opérations de concentration.

La présentation a été suivie d’un débat animé et passionnant sur les aspects tant politiques que juridiques de ces questions.